Tezuka hors du JaponLes États-Unis
Défenseurs et détracteurs américains
Fred Ladd (Fred Laderman, né en 1927), scénariste et producteur de films américains est connu comme étant l’un des premiers professionnels de l’audiovisuel à introduire les productions animée japonaise aux Etats-Unis. En 1963, la chaîne de télévision NBC Enterprises, a acquis les droits de la série japonaise Astro, Tetsuwan Atomu, et a consulté alors Fred Ladd pour élaborer son développement commercial.
Dès les années 1960, la société Disney a vu Tezuka et son œuvre comme une menace envers son industrie, et a imposé un chantage aux réseaux (« networks ») de diffusion télévisée : si ces derniers ne renonçaient pas à diffuser Le Roi Léo (qui connaissait un certain succès aux États-Unis) et Astro Boy, Disney ne leur permettrait plus de diffuser ses propres productions. Pendant des années, les œuvres de Tezuka et les productions japonaises en général, animées ou non, ont subi un véritable blackout aux États-Unis. Il a fallu l'intervention d'une importante base de « fans » — notamment dans le domaine de la bande dessinée —, le délitement de l'autorité de Disney (qui, ayant ses propres chaînes de télévision et réservant à ses dernières la plus grande part de sa production, n'avait plus grand chose à offrir) et la multiplication exponentielle du nombre de chaînes de télé pour que les séries japonaises apparaissent à nouveau sur le petit écran américain, au début des années 1990.
Les États-Unis demeurent cependant réceptifs à l'œuvre de Tezuka puisqu'en 1980 le International Film Festival de Las Vegas décernait alors son prix d'animation à Hi no Tori 2772 et le Comic-Con International de San Diego attribuait à Tezuka un Inkpot Award.
Les aventures du Roi Léo au nouveau monde de 1960 à 1994 : De Kimba, the white Lion à Simba, the Lion King.
Au Japon, le Roi Léo est d'abord un manga, puis dès 1965, la première série animée en couleur du Japon. Une version doublée en anglais est conçue un an après.
Le public américain découvre peu après, les aventures du Roi Léo à la télévision. Le lionceau blanc a perdu son nom d'origine, Léo, pour être baptisé « Kimba » dans la version américaine. Cette série, Kimba the White Lion, rencontra un fort succès sur le sol américain. En 1994, les studio Disney connaissent le plus grand succès de leur histoire avec le Roi Lion. Le lionceau porte le nom de Simba. Si le scénario de Disney ne fait pas figurer l'intervention de l'homme, les similitudes avec l'œuvre de Tezuka sont flagrantes, tant sur le plan du scénario, des personnages, que du découpage de certaines scènes phares. Parmi les personnages créés par Tezuka, figurent, en plus du lionceau et de son père, roi des animaux au tragique destin : un vieux sage babouin, un oncle malfaisant et jaloux portant une cicatrice, des hyènes. La scène de la célébration de la naissance du lionceau reprend également un nombre significatif de plans du manga, à la façon d'un story-board, ainsi que la scène marquante de la figure du père accompagnant son fils.
À ce jour, les avocats du studio Disney nient en bloc la référence à Tezuka, ils indiquent que les ressemblances ne sont que pures coïncidences et déclarent même ne pas connaître l'auteur. Cet argument ne trompe cependant personne, Helen Mc Carthy, journaliste américaine ironise sur le sujet : « Si vous étiez constructeur automobile et qu'aucun des designers de votre société ne connaissaient Honda, ne seriez-vous pas inquiet ? »
La controverse a été évoquée par plusieurs journaux aux Etats-Unis, aux nombres desquels une parution de juin 2007 du Los Angeles Times article.
De surcroit, l'acteur Matthew Broderick confie que lorsqu’il a été embauché pour le doublage de la voix de Simba dans le Roi Lion, il pensait à priori, que le projet était lié à Kimba the white Lion. "Je pensais qu’il s’agissait de Kimba, qui était un lion blanc dans un dessin-animé qui était diffusé quand j’étais petit." indique Broderick. "Alors, je disais à tout le monde que j’allais doubler Kimba."
En 1995 un épisode de la série animée Les Simpsons, parodie le Roi Lion dans une scène où le lion Mufasa dit à Lisa Simpson « Tu dois venger ma mort, Kimba...euh, je veux dire Simba! »
Les réticences européennes
En France, au Canada, en Espagne ou en Italie, les séries japonaises ont commencé à connaître un certain succès dès la fin des années 1970. Les séries Astro Boy (Astro le Petit Robot), Princesse Saphir (Prince Saphir) et Le Roi Léo seront diffusées à la télévision française dans les années 80.
La série le Roi Léo de 1965 a été traduite en anglais et en espagnol dès 1966, témoignant la volonté d'exporter l'œuvre à travers le monde.
De 1978 à 1981, Le Cri qui tue, est l'un des premiers magazines de bande dessinée à traduire et publier en France des mangas d'auteurs célèbres, dont le manga Ignis de Tezuka. Son créateur Atoss Takemoto, un jeune japonais avait pour vœux de faire découvrir à l'Europe la bande dessinée japonaise, de traduire ce qui « fait rire ou pleurer des millions de gens dans mon pays...» Il prévoit dès les années 80 l'avenir du manga en France « mon vœu le plus cher est de mettre les œuvres sous une forme telle que je pourrais, alors, abaisser le prix de vente au niveau du livre de poche.".
Sa revue a publié des mangas aux styles très différents. Le Cri qui tue est « le magazine qui a permis à ma génération de prendre contact avec la BD japonaise. On y trouvait aussi Tezuka et surtout Tatsumi, c'est-à-dire à la fois des auteurs pour enfants et des auteurs très durs.», explique Jean-Louis Gauthey, directeur de la maison d'édition Cornélius qui publie les séries Prince Norman, Hato, et d'autres livres de Tezuka.
Ces publications dans des magazines dédiées à la bandes-dessinées au sens large (européenne ou japonaise) que sont Le Cri qui tue ou les humanoïdes ont marqué leurs lecteurs de l'époque mais n'ont pas remporté le succès escompté. Les titres japonais ont été abandonnés et ne retrouveront les grâces du public qu'avec des auteurs plus modernes, des œuvres au marketing abouti, à une époque où le Japon sera considéré par la majorité des français comme un modèle de réussite économique.
C'est le domaine de la bande dessinée qui, en Europe, a résisté le plus longtemps à l'arrivée des productions japonaises. Des bandes dessinées adaptées de séries étaient diffusées en France. Les cases étaient réalisées sur place, issues du découpage des scènes des dessins animés et avec des scénarios maisons indigents, qui n'avaient rien à voir avec les œuvres originales. Pour cette raison, la bande dessinée japonaise a mis énormément de temps à faire savoir son existence en Europe, tandis que les dessins animés étaient eux très largement diffusés, jusqu'à la fin des années 1980, période à laquelle ils ont à nouveau disparu des écrans, sous la pression de personnalités politiques comme Ségolène Royal qui accusaient ces dessins animés de plusieurs maux : moralité douteuse, manque de qualités artistiques, violence, etc.
C'est dans un contexte d'ignorance vis-à-vis du dessin animé et de la bande dessinée japonaises qu'Osamu Tezuka s'est présenté au Festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 1982 pour projeter son film Hi no Tori 2772 dans une « indifférence totale ». À cette occasion il se lie cependant d'amitié avec Moebius qui sera un des premiers « passeurs » du manga en France.
Cependant, les critiques les plus avancés étaient déjà au fait de l'importance de Tezuka dans le patrimoine mondial de la bande dessinée.
C'est bien après la disparition de Tezuka, en 2004, que le festival d'Angoulême propose Ayako pour le « prix patrimoine » puis, deux ans plus tard, Prince Norman pour la même récompense (sans succès dans les deux cas).
Les mangas de Tezuka comptent parmi la première vague de mangas traduits en France, avec notamment les classiques Astro, Roi Leo, Black Jack et Bouddha, aux éditions Glénat, Tonkam puis Asuka et Delcourt. Depuis les années 2000, la traduction d'œuvres de Tezuka a fortement augmenté en France et les premières œuvres traduites de Tezuka ont fait l'objet de rééditions.
« Osamu Tezuka m’impressionne pourtant beaucoup et j’ai tendance à penser que, sans tenir compte de sa façon de dessiner et qu’elle ne peut pas plaire à tout le monde, il se pourrait bien qu’il soit l’auteur de BD le plus important de la BD mondiale. Il a tout exploré, tout inventé. C’est un des génies du vingtième siècle. » explique Dominique Veret, fondateur des éditions Tonkam.
« On peut facilement se faire de l'argent avec le manga en éditant des auteurs pour adolescents. Publier du Tezuka représente un autre challenge, mais indispensable. »
Œuvres traduites en françaisPar ordre chronologique de publication en français avec, entre parenthèses, la date de publication au Japon.
* Astroboy (1952-1968) :
o Glénat, coll. « Manga », 12 volumes, 1996-2000.
o Kana, coll. « Sensei », 5 volumes (anthologie), 2009-20??.
* Le Roi Léo (1950-1954), Glénat, 3 volumes, 1996-1997.
* Blackjack (1973-1983) :
o Glénat, 12 volumes, 1996-2000.
o Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 17 volumes, 2004-2006. Chez le même éditeur : Blackjack, le médecin marron, coll. « Shônen », 3 volumes, 2006.
* La vie de Bouddha (1974-1984), Tonkam, coll. « Tsuki Poche », 8 volumes, 1997-1999.
* L'Histoire des 3 Adolf (1983-1985), Tonkam, coll. « Tsuki Poche », 4 volumes, 1998-2001.
* Le Cratère (1969-1970), Tonkam, 2 volumes, 2000.
* Phénix, l'oiseau de feu (1956-1989), Tonkam, coll. « Tsuki Poche » 11 volumes, 2000-2002.
* Ayako (1972-1973), Delcourt, coll. « Akata », 3 volumes, 2003-2004.
* MW (1976-1978), Tonkam, 3 volumes, 2004.
* Nanairo inko (1981-1983), Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 5 volumes, 2004.
* L'Arbre au soleil (1981-1985), Tonkam, 8 volumes, 2004-2006.
* Princesse Saphir (1953-1957), Soleil Productions, coll. « Soleil Manga », 3 volumes, 2005.
* Vampires (1966-1969), Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 3 volumes, 2005.
* Unico (1976-1979), Soleil Productions, coll. « Soleil Manga », 2 volumes, 2005.
* Barbara (1973-1974), Delcourt, coll. « Akata - Ginkgo », 2 volumes, 2005.
* Metropolis (1949), Taifu Comics, coll. « Taifu Classic », 2005.
* Kirihito (1970-1971), Delcourt, coll. « Akata - Ginkgo », 4 volumes, 2005-2006.
* Prince Norman (1968), Cornélius, coll. « Paul », 3 volumes, 2005-2006.
* L'Enfant aux trois yeux (1974-1978), Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 8 volumes parus, 2005-2007.
* Dororo (1967-1968), Delcourt, coll. « Akata - Ginkgo », 4 volumes, 2006.
* Les Enfants de saphir (1958-1959), Soleil Productions, coll. « Soleil Manga », 1 volume, 2006.
* Histoires pour tous (?), Delcourt, coll. « Akata », 18 volumes parus (20 prévus), 2006-2011.
* I.L (1969-1970), Casterman, coll. « Sakka », 2006.
* Hato (1964-1967), Cornélius, coll. « Paul », 3 volumes, 2006-2007.
* Avaler la terre (1968-1969), Milan, coll. « Kanko Classiques », 2 volumes, 2006.
* Don Dracula (1979), Soleil Productions, coll. « Soleil Manga », 2 volumes parus, 2006-2007.
* Ludwig B. (1987-1989), Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 2 volumes parus, 2006-2007.
* Demain les oiseaux, Delcourt, 1 volume, 2006.
* La légende de Songoku (1952-????), Akata, 4 volumes parus. 2006-2008.
* Tonkaradani (1953-1957), Milan, 1 volume, 2007.
* Midnight (1986-1987), Asuka, coll. « Le meilleur d'Osamu Tezuka », 4 volumes parus. 2007-2008.
* Triton (1979), Soleil Productions, coll. « Soleil Manga », 3 volumes parus, 2007-2008.
* Lost World (1948), Taifu Comics, coll. « Taifu Classic », 2007.
* Next World (1951), Taifu Comics, coll. « Taifu Classic », 2007-2008.
* Le château de l'aurore (1959), Cornélius, coll. « Paul », 1 volume, 2008.
* Kaos (1978), Cornélius, coll. « Paul », 2 volumes paru (3 prévus), 2008.
* Ikki Mandara (1979), Kana, coll. « Sensei », 1 volume, 2008.
* Gringo (1987-1989), Kana, coll. « Sensei », 1 volume, 2009.
* Shumari (1974), Tonkam, 4 volumes, 2007-2008.
* La femme insecte (?), Casterman, coll. « Sakka », 1 volume, 2009.
Adaptations et productions
Séries TV
* Astro / Tetsuwan Atom, 3 séries : 1963, 1980, 2003)
* Le Roi Léo / Jungle Taitei 3 séries : 1966, 1972 (Shin Jungle Taitei Susume Leo), 1989
* W3 / Wonder 3, 1965
* Princesse Saphir / Ribbon no kishi, 1967
* Les Aventures de Goku / Goku no Daibouken, 1967
* Dororo / Dororo to Hyakumaru, 1969
* Fushigi na Merumo, 1972
* Triton of the Sea / Umi no Triton, 1972
* Jetter Mars, 1977
* Don Dracula, 1982
* Magie Bleue / Aoi Blink, 1990
* Magma Taishi, 1993
* Tezuka Osamu no Kyuuyaku Seisho Monogatari - In the Beginning, 1997
* Black Jack, 2004
* Hi no Tori, 2004
Films
Filmographie sélective :
* Saiyuki (西遊記 « pérégrination vers l'ouest », traduit en anglais par Alakazan the Great) 1960, son premier long métrage, une adaptation de xiyouji (西遊記 Le Voyage en Occident), racontant l'épopée légendaire chinoise de sunwukong (孫悟空, son-goku en japonais), le roi singe. Les studios d'animation de Shanghaï avait déjà produit un long métrage sur le même thème, (铁扇公主, noir et blanc, 1941) et en ont produit un autre (大闹天宫 da nao tiangong, couleur, 1964). Tezuka dessinera une illustration avec le Sunwukong du film de 1964 et Astro en hommage au travail des animateurs de Shanghaï.
* Histoires du coin de la rue (moyen métrage), 1962
* Tableaux d'une exposition (recueil de courts métrages), 1966
* Les Mille et Une Nuits (long métrage), 1969
* Cléopatre / Kureopatora, (long métrage) 1970
* Le Prince du soleil / Hyakumannen Chikyû no Tabi Bander Book, 1978
* Mam'zelle Tom Pouce / Andersen dowa Oyayubi-hime, 1978
* Phénix 2772, l'oiseau de feu / Hi no Tori 2772 - Ai no Cosmozone (long métrage), 1980
* La Légende de la forêt (court métrage), 1988
* Princesse Saphir / Ribbon no kishi, 1994
* Metropolis, 2001, Tezuka Production, Réalisation : Rintaro,
Adaptations :
* Astroboy - Le Film 3D, 2007/2009, film d'animation américain, réalisation : David BOWERS,
* Dororo, Film Live, 2007
Bibliographie
* Hervé Brient (dir.), Manga 10 000 images n°2 : Osamu Tezuka : dissection d'un mythe, Versailles : Éditions H, 2009, 256 pages.
* Thierry Méranger, « Tezuka, l'éternel pionnier », Cahiers du cinéma, n° 616, octobre 2006, p. 22.
* (de) Susanne Phillips, Tezuka Osamu. Figuren, Themen und Erzählstrukturen im Manga-Gesamtwerk. Munich : Iudicum, 2000. (ISBN 3-89-129810-2)
* Tezuka Productions (trad. Marie-Françoise Monthiers), Osamu Tezuka : Biographie, 4 volumes, Casterman, coll. « Écritures », 2004-2006.
Source Wikipedia
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